1- Historique :
Dans la première partie des années 80, alors que le marché des consoles de jeux vidéo est au plus mal et se retrouve très proche de ce qui sera nommé par la suite « Krach du jeu vidéo » (fin 1983) en raison de la préférence des foyers pour les micros-ordinateurs, l’industrie naissante de l’informatique domestique se porte de mieux en mieux et voit éclore des systèmes comme les Atari XL (1200XL en 1982 suivi des 600XL et 800XL en 1983), Amstrad CPC (CPC-464 en 1984 suivi des CPC-664 et CPC-6128 en 1985) Thomson MO5 (en 1984) où encore Commodore (C64 en 1982, Plus/4 en 1984 et C128 en 1985).
En 1983 Kazuhiko Nishi,un japonais de naissance alors vice-président chez Microsoft en charge de l’Extrême-Orient jusqu’en 1986 et cofondateur de ASCII Corporation (en 1977), créera en partenariat avec Bill Gates (pour la partie logicielle) une norme de micros-ordinateurs destinée à unifier les ressources logicielles et matérielles pour plusieurs constructeurs : la Machines with Software eXchangeability qui sera plus connue sous le nom de MSX par la suite.

Bill Gates & Kazuhiko Nishi
De nombreuses compagnies nipponnes comme Canon, Casio, Panasonic, Sanyo, Sony, Toshiba, Yashica et Yamaha se lanceront dans l’aventure MSX en produisant leurs propres machines. Coté Europe, c’est Philips et Schneider qui seront les principaux constructeurs de ce standard.
Ce ne seront pas moins de quatre générations de hardware qui verront le jour entre 1983 et 1990 (MSX, MSX-2, MSX-2+ et MSX Turbo-R) avec toujours des améliorations techniques par rapport aux modèles précédents (principalement au niveau de la mémoire et de la partie affichage vidéo).
Comme il fallait bien partir de quelque chose, Gates et Nishi décideront de se baser sur l’architecture matériel d’un machine déjà existante, le SV-318 de Spectravideo, hardware qui servira de référence pour la norme MSX.

Le Spectravideo SV-318 avec ses extensions
2- Spécifications techniques :

L’architecture matériel de la première vague de MSX (les MSX-1) sera basée sur un Zilog Z80, un processeur 8bits très répandu, élément centrale de nombreux systèmes informatiques de l’époque et qui équipera par la suite des machines comme la MasterSystem, la Megadrive ou encore la NeoGeo ainsi que les portables GameBoy et GameGear.
Ce processeur est cadencé à 3,58MHz (pour comparaison, c’est la vitesse de cadence de la MasterSystem) et est épaulé par un circuit vidéo Texas Instruments TMS9918 (qu’on retrouvera également dans la MasterSystem) capable d’afficher des graphismes en 256*192 pour 16 couleurs parmi 32 disponibles ainsi qu’un générateur sonore General Instrument AY-3-8910 (une copie du Texas Instruments SN76489 qui sera lui aussi déployé dans de nombreuses consoles de jeux) offrant 3 voies de signaux.
Coté mémoire, les différents produits de la norme offriront une mémoire vive (RAM) allant de 8Ko à 64Ko ainsi qu’une mémoire vidéo de 16Ko pour tous le monde. Une mémoire morte (ROM) de 32Ko sera disponible pour chaque modèle afin d’y accueillir le MSX-BASIC 1.0 développé par Microsoft.

Pour la seconde vague de MSX (les MSX-2) en 1985, le Z-80 sera conservé (pour la même cadence) mais le processeur vidéo sera remplacé par un Yamaha V9938 capable de délivré de 16 à 256 couleurs (selon le mode choisi) parmi 512 pour une résolution maximale de 512*212.
La mémoire vidéo passe de 16Ko à 64Ko et la mémoire vive (RAM) est fixée basiquement à 64Ko. Un nouveau BASIC (le MSX-BASIC 2.0 désormais développé par ASCII) verra le jour pour l’occasion et occupera une mémoire morte (ROM) plus importante que la version 1.0 avec 48Ko contre 32Ko précédemment.
Les lecteurs disquettes, jusqu’ici optionnels commencent désormais à se généraliser de série sur les nouveaux systèmes MSX.

Les MSX-2 verront leur architecture revue en 1988 avec la norme MSX-2+ qui visera à améliorer le circuit vidéo en intégrant la nouvelle génération de processeurs Yamaha V9958 capable d’afficher jusqu’à 19.268 couleurs sur une résolution de 256*212 tout en conservant les caractéristiques de l’ancienne génération pour la résolution de 512*212. Ce processeur sera accompagné d’une mémoire vidéo également plus importante passant de 64Ko à 128Ko.
Toujours au rayon des améliorations graphiques, les MSX-2+ posséderont un système d’accélération matériel capable d’améliorer la fluidité des plans de défilements (scrolling), véritable point noir des anciennes architectures.
Et bien entendu, à nouvelle version, nouveau BASIC avec la version 3.0 du MSX-BASIC.

L’ultime révision de la norme MSX arrivera en 1990 avec la MSX Turbo-R qui conservera les caractéristiques vidéo des MSX-2+ tout en changeant de processeur centrale. Exit donc le Z-80 (qui sera tout de même conservé pour assurer la rétrocompatibilité avec les anciens systèmes) pour passer sur un R-800 développé par ASCII Corporation qui sera cadencé à 7,16MHz et soutenu par 256Ko ou 512Ko de mémoire vive (RAM).
Coté son, la refonte sera également totale avec un chipset composé du générateur de base General Instrument AY-3-8910 appuyé par une puce FM Yamaha YM2413 (proposée en cartouche optionnelle pour les MSX-2+ durant leur commercialisation) ainsi que par un générateur PCM mono 8bits.
Et pour bien faire, passage en V4.0 du BASIC MSX-BASIC.



MSX-1 (Toshiba HX-10) & MSX-2 (Philips 8235)


MSX-2+ (Sanyo PHC-35) & MSX-Turbo-R (Panasonic A1ST)
3- Médias :
Les cartouches :
Le média principale du MSX est la cartouche ROM. Ces dernières sont de taille sensiblement égale à celle d’une cassette audio et s’insèrent dans les ports prévus à cet effet sur les micros-ordinateurs de la gamme. Les MSX sont tous équipé d’au minimum 1 slot cartouche pour accueillir les programmes. Certains en possèdent plusieurs (pour permettre l’insertion de périphériques optionnels sans gêner l’utilisation des jeux) qui sont totalement interchangeables permettant de faire fonctionner la cartouche indépendamment de son emplacement d’insertion.

Ces cartouches offrent divers possibilité puisqu’elles permettent d’insérer des programmes informatiques, des extensions matériel, des extensions de mémoire et surtout, des jeux vidéo !

Le jeu Metal Gear sur cartouche MSX
L’éditeur Konami décidera de tirer parti de ces multi-ports pour proposer une expérience amusante aux possesseurs de ses jeux en permettant l’échange d’informations in-game entre deux cartouches. Ces combinaisons permettent donc, par exemple, de modifier les sprites d’un jeu par ceux d’un autre (exemple, les sprites du jeu Nemesis/Gradius remplacés par ceux de Twinbee si les deux cartouches sont associées).


Le jeu Gradius/Nemesis seul dans le MSX


Combiné à Twinbee, le vaisseau est remplacé par celui de Twinbee, et les capsules par des cloches
Un autre exemple avec Nemesis2/Gradius2 combiné au jeu Penguin Adventure qui permet de transformer le sprite d’origine par un pingouin qui tire des coeurs au lieu des traditionnels missiles tout en récupérant des poissons via les capsules qui, elles aussi, ont changées de forme pour l’occasion.


Le jeu Gradius2/Nemesis2 seul dans le MSX


Combiné à Penguin Adventure, le vaisseau devient un pingouin et les capsules se transforment en poissons
D’autres combinaisons sont faisables avec, par exemple, la possibilité d’accéder à des cheat-modes (exemple, vous pouvez choisir quel niveau commencer et modifier les vies dans Vampire Killer si la cartouche est associée avec The Game Master, la Cheat-Cartridge de Konami) ou bien encore bénéficier d’un soutiens bien utile à un moment opportun (votre père vous redonne de la vie juste avant votre mort dans Yie Ar Kung-fu 2 si la cartouche du premier opus est associée).
Toujours du coté de chez Konami, sachez qu’il existe une cartouche d’extensions de capacités musicales basée sur une puce développée conjointement entre Konami et Yamaha (la SCC pour Sound Custom Chip) et intégrée dans certains jeux de l’éditeur qui permettent d’ajouter 5 canaux audio supplémentaires ainsi que la possibilité d’utiliser des samples audio. Ces cartouches seront nommées SCC+ et seront disponibles seulement pour les jeux Snatcher et SD Snatcher qui se trouvent être au format disquette et ne pouvaient donc, de ce fait, pas profiter de la SCC embarquée.


Les SCC+ avec Snatcher et SD Snatcher
Les BeeCards :
Hudson Soft développera en 1985 un systeme de cartes ROM, les BeeCards, de la taille d’une carte de crédit qui permettra à la firme de porter ses jeux sur un format propriétaire tout en réduisant les coûts de fabrication face à ceux d’une cartouche ROM nécessitant plus de plastique, des cartes électroniques et surtout des composants! Ici, tout est compacté sur une puce intégrée. Bien entendu, les MSX n’étaient pas équipés d’origine pour accueillir ce format de jeux, c’est pourquoi un adaptateur de format BeeCard vers cartouche était nécessaire pour le bon fonctionnement des productions Hudson. Vous pouviez acheter le jeu seul ou en pack incluant l’adaptateur (les BeePacks) qui lui aussi sera trouvable séparément.

Le jeu Baseball Craze pour MSX en version BeePack
Au final, peu de jeux sortiront sur ce format (seulement 9) puisqu’il ne sera utilisé que pendant une courte période d’environ un an avant que l’éditeur ne se lance sur son propre système de jeu. Ces jeux sont référencés BC-M1 à BC-M9 et proposent, entre autres, les jeux Star Soldier, Bomberman ou encore Jet Set Willy. Ces BeeCards seront les bases du futur média utilisé pour les consoles PCEngine (les HuCards) que Hudson produira en partenariat avec NEC en 1987.

Quelques HuCards de la PCEngine
Les disquettes :
Les MSX-1 pouvaient accueillir des Floppy-Drives optionnels pour lire des disquettes au format 3,5 pouces. Ces lecteurs disquettes seront massivement inclus d’origine à partir des MSX-2 et de nombreux jeux sortiront sur ce support plus avantageux financièrement.

Le jeu HARE NOCHI OSAWAGI pour MSX au format disquette
Les cassettes :
Les vieux de la vieille y trouveront un coté très nostalgique puisque les MSX permettaient de lire, via un périphérique optionnel, des jeux au format Data-Cassette. Ce format était long à charger, bruyant (un bruit de modem 56K) mais ne perdurera pas sur la gamme MSX en raison de ‘adoption des disquettes sur les secondes versions de la norme.

Le jeu Hie Ar Kung Fu MSX au format cassette
Les Laserdiscs :
Une petite poignée de MSX se virent doter de la compatibilité avec le standard Laserdisc. Ce fut majoritairement le cas pour les micros-ordinateurs Pioneer Palcom (le PX-V7 et le PX-V60) ou bien un MSX combiné avec une interface Pioneer Palcom ER101 qui fonctionnaient parfaitement avec les lecteurs LDs Pioneer LD-500, LD-7000 et LD-V1000. Certains MSX Sony acceptent également des lecteurs LDs mais la liaison qu’ils utilisent (RS232 alors que les Pioneer utilisent un système d’I/O spécifique) ne permettent pas de jouer mais simplement de faire de la capture d’image pour les retravailler sur les logiciels MSX.

Un Pioneer PX-V7 relié à un lecteur Laserdisc
Au final, seulement 11 jeux sortiront sur ce support avec notamment Astron Belt de SEGA ou encore Badlands de Konami. Ces jeux sont majoritairement des séquences de films sur lesquelles sont superposés les sprites du jeu.
4- Les jeux :
Dans une liste loin d’être exhaustive, voici donc quelques jeux intéressants qui ont marqué l’ère MSX (et aussi l’histoire du jeu vidéo puisque certaines sagas sont toujours actives après 3 décennies…). La version minimum requise du MSX pour faire tourner le jeu figure à coté de son titre :


Contra (MSX2) & Metal Gear (MSX2)


Metal Gear 2 Solid Snake (MSX2) & Vampire Killer (MSX2)


Aleste (MSX2) & Aleste 2 (MSX2)


Gradius (MSX) & Gradius 2 (MSX)


R-Type (MSX/MSX2)& Space Manbow (MSX2/MSX2+)


Star Soldier (MSX) & Twinbee (MSX)


Hinotori (MSX2) & Parodius (MSX)


Knightmare (MSX) & Maze Of Galious Knightmare 2 (MSX)


Q-Bert (MSX) & Bomberman (MSX)


Quarth (MSX2) & Tetris (MSX2)


King’s Valley (MSX) & King’s Valley 2 (MSX2)


Eggerland Mystery (MSX) & Eggerland 2 (MSX/MSX2)


Hydlide (MSX2) & Ganbare Goemon (MSX2)


Hyper Rally (MSX) & F1-Spirit (MSX)
5- Conclusion :
Micro-ordinateur pour les uns, véritable console de salon pour les autres, la gamme MSX aura ravis de nombreux joueurs entre le début des années 80 et le début des années 90. Après 4 évolutions et un très grand nombre de variations de design (en raison d’un nombre important de constructeurs ayant exploités la norme).
Le MSX est le support où sont nées les plus grandes saga du jeu vidéo. De Metal Gear à Vampire Killer (Castlevania) en passant par Gradius ou encore Slamander, la plateforme sera le terrain de mise en lumière d’éditeurs (qui d’ailleurs seront parmi les plus prolifiques!) comme Konami, HAL Laboratory ou encore NamcoT et Sony. En dehors des consoles tels que les Atari 2600 ou bien la CBS Colecovision qui portaient les jeux d’arcade de la fin des 70’s et du tout début des années 80, le MSX sera un des moteurs de la démocratisation des productions de dernières générations (milieu des 80’s) issues des salles de jeux.
Dossier réalisé par Citylab2, Elodiebo et DarkPengoo