HS N°1 : Sega et l’art du recyclage

Le Journal du Hard vous propose un rendez-vous hors-série mensuel. Ces dossiers ont pour but de vous faire découvrir l’envers du décor de vos consoles de jeu vidéo. Ce mois-ci, c’est du coté de chez Sega que le coeur du sujet se fera et, plus précisément sur la capacité des services recherches et développements de la firme à faire de neuf avec du vieux…

En décortiquant un peu les spécifications et les schémas techniques des consoles SEGA, je me suis aperçu que toutes les machines jusqu’à la Dreamcast n’étaient en fait que des updates des générations précédentes et de leurs add-on…

Top départ de la lignée évolutive avec la première console de Sega, un clone (assumé) dans toute sa splendeur de la mythique Colecovision !

La SG-1000 :

Prenons la base avec la SG-1000 qui est considérée comme la première console de jeu de SEGA. Les spécifications nous donnent un processeur NEC-780C qui n’est autre qu’un clone japonnais du célébrissime Zilog-Z80 américain qui équipa un grand nombre de consoles et de micros 8bits dans les années 80.


Pour la gestion de l’affichage et des couleurs, la SG-1000 embarque un Texas Instruments TMS9918 capable d’afficher 16 couleurs dans une résolution d’écran de 256*192.

La console est équipée d’une puce Texas Instruments-SN76489 pour la restitution du son. Coté mémoire, on retrouve dans la machine 1Ko de RAM et 16Ko de mémoire vidéo.

La Mark III ou Master System :

L’évolution majeur de la SG-1000 se fera par le biais de la Mark III/Master System qui reprendra l’architecture de sa grande sœur avec une mémoire vidéo identique et une RAM multipliée par 8 (8ko contre 1Ko avant).


Le processeur central devient un véritable Z-80 (et non plus un clone) mais garde la même cadence que celui de la SG-1000. Du coté de l’affichage, le TMS9918 est à nouveau utilisé dans une version upgradée (ajout de registres principalement) et permet cette fois d’afficher 32 couleurs.

Coté son, le SN76489 est toujours à l’honneur. La Mark III/Master System se verra augmentée d’un module optionnel de synthèse FM (le FM Sound Unit) équipé d’une puce Yamaha-YM2413 et qui permet d’apporter des voix de synthèses d’instruments en renfort de la puce sonore initiale.

La Megadrive :

Passons maintenant du coté de la Megadrive. Cette dernière est équipée d’un processeur centrale 16bits Motorola-68000. Ce processeur est l’évolution du Motorola 6800 (8bits) qui n’est autre qu’une version concurrentielle de l’Intel 8080 dont le Z80 des SG-1000/Mark III/Master System à été conçu pour être 100% compatible (pas un clone, mais presque). La cadence est poussée à 7,67Mhz et la mémoire RAM ainsi que celle de la vidéo sont augmentées à 64Ko.


SEGA fera fabriquer par Texas Instruments une version custom de son VDP (processeur vidéo) intégrant un TMS9918 (modifiée une fois de plus pour permettre l’affichage en 320*224 avec 64 couleurs) de la Mark III/Master System ainsi que le processeur sonore SN76489 également présent dans les anciennes générations de consoles de SEGA. Ce processeur customisé sera épaulé par un second chargé de la gestion de la synthèse sonore FM (le Yamaha-YM2612) qui ne sera rien d’autre qu’une version économique du YM2413 utilisé dans le module FM add-on de la Mark III/Master System.

Le premier add-on de la Megadrive sera le Mega CD (ou Sega CD). Le lecteur CD apportera un second processeur 68000 cadencé à 12,5Mhz chargé de prendre le relais de celui de la console hôte mais aussi d’ajouter des effets sur les sprites (agrandissement, rotation,…) et de gérer les données en provenance du CD-ROM.


Le second add-on de la Megadrive n’en est pas vraiment un… En effet, il s’agit ici d’une puce embarquée dans une cartouche (à la manière d’une SuperFX pour Nintendo) chargée de permettre la génération de polygones non texturés dans un environnement 3D. Le processeur se nomme SVP (pour Sega Virtual Porcesseur) et est une veritable prouesse technique pour son époque. Il ne sera malheureusement pas exploité en dehors du jeu Virtua Racing en raison de son prix trop élevé pour une production aussi faible que pourrait l’être celle d’un jeu en fin de vie de console.


Le dernier add-on de la Megadrive sera le 32X. Le module à insérer dans le port cartouche de la console permet de passer outre le processeur centrale de la machine pour reléguer cette dernière à un rôle de simple module vidéo (VDP) et sonore. Deux processeurs Hitachi-SH2 servent à prendre le contrôle centrale de l’architecture créée et à ajouter un environnement graphique 3D en 32bits grâce à l’ajout du processeur vidéo. On peut d’ailleurs observer les ajouts de ce module en débranchant le câble reliant le 32X à la Megadrive et constater que la console ne prend plus en charge que la gestion des fonds de décors et du son…


La Saturn :

Pour finir, attaquons nous à la Saturn. La 32bits de SEGA n’échappe pas à la règle du recyclage technologique de ses aînées… Elle embarque 8 processeurs répartis comme suit :


– 2 Hitachi-SH2 (versions japonaises des Motorola-68020 issus de la même famille que les 68000) déjà présents dans le 32X. Ils sont utilisés comme processeur centraux avec un fonctionnement en parallèle (bien que 90% des jeux n’en utiliseront qu’un seul des deux).

– 2 VDP (1&2) qui sont respectivement celui du 32X et celui de la Megadrive. Le premier est utilisé pour la gestion des sprites et la génération des polygones. Le second, quand à lui, est utilisé pour gérer les plans de scrolling et les arrières plans avec la gestion des effets sur ces derniers.

– 1 SCU (pour Sega Control Unit) qui n’est rien d’autre qu’une version « on a chip » de la technologie utilisée dans la cartouche de Virtua Racing sur Megadrive (le fameux SVP pour SEGA Virtual Processor). Il agit en appuie du VDP-1 pour la gestion de la géométrie et de l’affichage des graphismes 3D.

– 1 Hitachi-SH1 (version japonaise du Motorola-68000) utilisé pour gérer les transferts depuis le CD-ROM ainsi que la décompression des données « à la volée ». Il aura la même fonction que celui utilisé dans le Mega CD.

– 1 Motorola 68EC000 (qui n’est rien d’autre qu’une version économique du 68000, d’où le EC au milieu de la référence) chargé de la gestion du son qui reprendra la fonction du processeur centrale de la Megadrive lorsque le Mega CD ou le 32X sont branchés.

– 1 DSP Yamaha-FH1 qui n’est autre qu’une version « on a chip » du module FM YM2413 de la Megadrive couplé à un générateur de son en PCM (formes d’ondes numérisées utilisées pour éviter d’avoir à utiliser des circuits analogiques pour générer des sons) et à une mémoire interne pour stoker des échantillons numériques (voix et effets) à la manière d’un sampleur. Cette puce est en fait un condensé de synthétiseur/workstation pour musiciens.

Conclusion :

C’est sans trop d’exagérations qu’on pourrait affirmer que la Saturn est une SG-1000 boostée aux amphétamines… À y regarder de plus près, il n’y a vraiment que les processeur centraux (toujours des évolutions de la gamme précédente ou une version économique), les cadences et la mémoire qui évolue sur les 4 générations de machines. Tout le reste n’est qu’intégration « on a chip » des add-ons développés ci et la durant les périodes d’exploitations des consoles…

La Master System est une SG-1000 boostée. La Megadrive est une Master System japonaise (donc avec le module FM intégré directement dans le hardware) augmentée d’un processeur 16bit (la compatibilité entre les deux machines est d’ailleurs possible via un simple adaptateur de brochage pour les cartouches). La Saturn est une Megadrive augmentée d’un duo de processeurs 32bits (et oui, le multi-coeurs n’existait pas encore) et d’un lecteur CD…



Evolution du jeu Hang-On depuis la SG-1000 jusqu’à la Saturn.

Il n’y a vraiment que la Dreamcast qui a échappée à cette règle d’ingénierie par upgrade puisque comme toutes les machines de sa génération, elle à adoptée une architecture basée sur des cartes accélératrices 3D issues du monde du PC (PowerVR) ainsi que d’une gestion assistée par un système d’exploitation. C’est d’ailleurs une machine qui a demandé un développement coûteux (basé sur des partenariats avec NEC et Microsoft) et dont l’échec commerciale (à peine 8 millions d’exemplaires vendus à travers le monde contre 157 de PS2, 25 de XBox et 22 de GameCube) explique en partie les raisons de l’abandon du développement des consoles par Sega.

Cette technique de « recyclage » permet également de comprendre comment le constructeur a réussi à tenir si longtemps sur le marché avec autant d’échecs commerciaux : débacle de la SG-1000, flop de la Master System (sauf en Europe), échecs des Sega-CD et 32X, semi-échec de la Saturn et tout ceci sans compter le peu d’intérêt porté par les joueurs pour les portables GameGear et Nomad.

Cumulées les ventes mondiales de consoles et add-on de Sega jusqu’à la Saturn (portables incluses) sont estimées à moins de 80 millions d’exemplaires ! C’est environ 20% de moins que la seule Playstation première du nom écoulée à un peu plus de 100 millions d’unités… Même en additionnant les ventes de la Dreamcast (8,2 millions) ce chiffre ne sera pas atteint !

Rendez-vous donc le mois prochain pour une plongée encore plus en profondeur dans les entrailles de l’électronique numérique des consoles pour un nouveau numéro hors-série du Journal du Hard toujours dédié aux machines Sega (non pas choisies par fanboyisme mais pour leur relative simplicité de fonctionnement et de compréhension pour les néophytes).

DarkPengoo

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